vendredi 2 novembre 2007

Elles se regardaient encore ainsi quand une pluie torrentiele s'abbatit contre les fenêtres du petit salon. Le soleil s'était couvert d'un duvet grisâtre et mousseux, emplisant la pièce d'une lueur sale. à cet instant, Anne sembla la seule chose qui puisse encore resplendir. Elle; appuyée, agrippée au mur, les jambes nues, le souffle hallettant, l'air ennivrée, le couer perdue... esperant ne jamais être retrouvé. Sophronies s'avança, troublée.
Partout des hanches de femmes se balançaient sous des jupes brodées. Le bedeau sonna sa cloche pour la troisième fois et, en troupeau docile, un cortège de chevelures bouclées et de souliers cirés se dirigèrent vers l'intérieur de l'église. Sophronie sentit sur elle des regards appuyés et crus. Quelques uns des cousins Daudelins la regardaient avec insistance, s'attardant sur la peau lumineuse de son cou, sur ces bas veillis enserrant des mollets jolis et potelés. Sébastien fourra alors les mains dans ses poches et Sophronie s'apperçut rapidement qu'il caressait, du bout des doigts, son membre érigé, bien dissimulé sous le pan de son veston long. Elle franchie les portes ouvertes, plongea ses doigts dans l'eau sainte et s'en signa en maudissant l'Existence en elle-même. Elle s'effondra sur le bois rougeoiyant de la banquette en ne prennant garde aux réactions qu'elle provoquai autour d'elle. Non loin de là, anne tournait son chapeau de pailles blanches entre ses mains, laissant glisser ses paumes sur le ruban duveteux de velour pourpre qui l'enserrait. Elle se cambra délibérément dans l'allée de marbre où le curé et son petit servant s'enguageaient déjà, pour ramasser son couvre-chef qu'elle avait fait mine d'échapper là par maladresse. Elle prit son temps, espérant croiser les yeux de Sophronie,eux, rivés sur une Sainte Vierge de plâtre et d'or terni. L'abbé imposa sa silhouette soutanée du haut de la chaire et proferra une litanie latine que les fidèles écoutaient serainement comme si ils y eux compris quelque chose. Sophronie n'avait pas lâchée des yeux la statuette qu'elle semblait dévorer du regard; s'arrêtant successivement à son oréole et à ses jambes menues, en passant par ses mains déliberement déposées sur son sein. Anne se trouva une certaine ressemblance avec la Sainte-femme: de par ses cheveux qui ondulaient sur ses épaules comme un voile, par sa bouche minuscule, sinueuse, silencieuse et torturée. Les yeux vitreux et les mains crispées à ses jupons, Anne fut secouée de tremblements lamentables. Elle frémissait. Elle frémissait à l'idée de n'être plus regardée de cette façon, de n'être pour elle qu'une folie, de n'être rien... ni joie, ni amour.
Il y avait une petite pluie d'été ce jour là. Novembre avait un soleil à lui. Sophronie sortie sur le pas de la porte de la petite cuisine. Elle se retint fortement à la rampe et s'inclina le plus qu'elle put vers l'avant, au dessus des escaliers de béton qui sortait du roc en aggrippant la maison. Elle laissa la pluies tomber sur sa nuque. Il fesait bon. Elle aurai aimée allez nager, se promener nue...Elle se retourna, étira un peu le cou.. oui, il n'y avait personne...
Le lourd crochet de métal se rabatti bruyamment plusieurs fois sur le cadre de la porte avant de s'emboîter enfin dans son fermoir. Les tintements métaliques se mellerent bientôt aux squicks caoutchoutés des lourdes bottes et au rire saccadé d'Eugène, ainsi qu'aux retentissements nombreux et odorants de ses malaises intestinaux. Louis lui lança quelques insultes étouffés alors qu'Édith lui dit bien net de se la fermé. Eugène buvait pour oublier, comme tout les hommes.. Sophronie se dit en elle même qu'en fait, c'était bien pour oublier qu'ils étaient des hommes qu'ils buvaient autant. Les deux lit de la petites chambre du haut s'agittaient maintenant de ronchonnements, tandisqu'Eugène continuait son brouhaha silencieux en tentant de se dévêtir tout en se prenant les pieds à tout bout de champs dans les meubles. La plus petite dormait encore à point fermé, heureusement. Édith se retourna dans le lit. Elle coinça ses bras sous l'oreiller et se courba de sorte à se que ses cuisses se collent à celles de sa soeur. Sophronie dormait rarement. Elle détestait ces contacts intimes, ces frollements de pieds froids, de jambes rugueuses sur son corps. Elle détestait l'odeur aigü et floral des longs cheveux d'Édith qui contrastait tellement avec le parfum âcre qui s'impregnait dans le matelat lorsque sa plus jeune soeur urinait dans son someille. La pauvre petite pleurait alors, tandisqu'Édith changeait les draps en la maudissant. Sophronie, elle, lui venait des goûts de violence: elle s'imaginait jetter cette petite chose poisseuse et mal-odorante du haut du deuxième, pour qu'elle se fracasse... pour qu'à vingt ans, la femme qu'elle est puisse se toucher, seule, dans la noirceur de son lit.. pour que, du moins, elle n'est plus à séveiller humectée, trempée et en ayant des haut-le-coeur. Les trois soeurs s'entassaient dans un lit alors qu'Eugène essayait tant bien que mal de se hisser dans celui de Louis qui s'obstinait à prendre toute la place. Sophronie dût s'endormir alors alors parce qu'elle ne s'éveillat que lorsque la brunante pointa ses dégradés de mauves et de gris par la fenêtre du deuxième. Eugène sanglottait. Il n'avait pas dormit, pas plus qu'il n'avait désaoulé. Édith se raidit dans le lit et lui lança un affreux juron, suivi d'une série de «ta yeule» haineux et rageurs. Elle se retourna une nouvelle fois en marmonnant. À travers le flo de chuchottement qui envahïssait alors la chambre des enfants Lapointe, on entendit distinctement le mot «tapette» se détacher du lot et se répercuter sur tous les murs de la pièce. Silence. Louis lâcha un gloussement et Eugène se tut. En effet, Flavie et la petite voisine d'à côté l'avaient surprit avec le fils aîné des Demers. Les enfants auraient rapportées innocemment qu'ils jouaient avec leurs zizis derrière les silos à grains. Depuis, personne n'en avait parlé, et il était certain que personne n'en parlerait jamais. Sophronie, elle, y pensait souvent, et elle était certaine qu'Eugène, lui, y pensait tout le temps. Ses pensées convergèrent bientôt vers Anne qui devait passée en matinée pour lui apporter une paire de gant avant leur départ pour la messe. Elle n'avait pas envie de la voir. Ses cheveux brillants lui fesaient mal au coeur, ses yeux étaient trop verts, ses mains trop douces pour qu'elles puissent le suporter. Sur ce, elle écartat les couvertures et posa ses pieds nus sur le parquet gelé. Elle traversa vivement la pièce pour s'installer sur le pot de chambre d'où se dégageait une puanteur chaudasse. Elle souleva alors sa jaquette tout en regardant le soleil étendre ses courbes jaunâtres à travers la fenêtre.
Il était presque 10h lorsque Sophronie soulevea sa jupe. Elle riait du rires des jeunes femmes libres et épanouïs, en montrant les dents.. autant pour sourire que pour mordre. Sa compagne poussa un petit cri amusé lorsqu'elle se précipita dans son cou, la lèchant, lui mordillant l'oreille tout en remontant sa main le long de la cuisse tiède de son amante. Elle n'avais jamais rien connue de tel. Sa main rencontra la jartière d'Anne qui la regardait d'un air mielleux amusé. Aucune des deux amies ne parlait. Anne pensa soudain qu'il était facheux de se dévêtir ainsi alors qu'elles portaient si rarement de belles toilettes. La pièce était baignée de la lumière jaunâtre des matins ensoleillés d'automne. Le bois de la fenêtre imprimait une croix sombre sur le plancher vernis du petit salon. Les jeunes femmes, maintenant immobiles, se regardaient silencieusement entre les mèches folles sorties de leurs coiffures tirées. Le vent sifflait au dehors en entrant par les fenêtres entrouvertes. Il fesait frais dans la pièce et le bras, et la jambe sur laquelle il était posé se hérisserent de frissons en même temps que ces seins corsettés de fleuries et de pourpres.